Ãëàâíàÿ Ñëó÷àéíàÿ ñòðàíèöà Êîíòàêòû | Ìû ïîìîæåì â íàïèñàíèè âàøåé ðàáîòû! | ||
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avec un air de dégoût en désignant la poubelle accrochée à un
poteau.
Le hall des Urgences était désert. J’ôtai ma blouse, attrapai
mon manteau dans le local de garde et poussai la chaise
roulante au-dehors.
Je guettais un taxi quand un ambulancier me reconnut et
me demanda où j’allais. Il terminait son service et accepta
gentiment de nous déposer. Tout aussi généreusement, il m’aida
à porter ma voisine dans l’escalier. Arrivés au cinquième étage,
nous étions à bout de souffle. Ma voisine me tendit ses clés.
L’ambulancier nous laissa et j’aidai la vieille dame à s’installer
dans son fauteuil.
Je lui promis de revenir lui apporter tout ce dont elle
pourrait avoir besoin; avec sa cheville fragilisée, il était
préférable qu’elle renonce à la cage d’escalier pendant quelque
temps. Je griffonnai mon numéro de téléphone sur une feuille
de papier, la posai en évidence sur un guéridon et lui fis
promettre de ne pas hésiter à me joindre si elle avait le moindre
problème. J’allais me retirer lorsqu’elle m’appela.
― Vous n’êtes pas très curieux, vous ne m’avez même pas
demandé mon prénom.
― Alice, vous vous appelez Alice, c’était inscrit sur votre
feuille d’admission.
― Ma date de naissance aussi?
― Également.
― C’est fâcheux.
― Je n’ai pas fait le calcul.
― Vous êtes galant mais je ne vous crois pas. Oui, j’ai
quatre-vingt-douze ans et je sais, je n’en fais que quatre-vingt-
dix!
― Bien moins, j’aurais juré que vous aviez...
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― Taisez-vous, quoi que vous disiez ce sera toujours trop.
Vous n’êtes quand même pas très curieux, je ne vous ai toujours
pas dit ce qui m’amusait tant en arrivant à l’hôpital.
― J’avais oublié, lui avouai-je.
― Allez donc dans la cuisine, vous y trouverez un paquet de
café dans le placard au-dessus de l’évier, vous savez vous servir
d’une cafetière?
― J’imagine que oui.
― De toute façon, ça ne pourra pas être pire que le poison
que vous m’avez servi tout à l’heure.
Je préparai le café du mieux possible et revins dans le
salon un plateau dans les mains. Alice nous servit, elle but sa
tasse sans faire de commentaire, j’avais réussi l’épreuve.
― Alors, pourquoi cette bonne humeur hier soir? repris-je.
Se faire mal n’a rien de réjouissant.
Alice se pencha vers la table basse et me présenta une boîte
de biscuits.
― Mes enfants m’emmerdent, si vous saviez à quel point!
Leurs conversations m’insupportent, la femme de l’un et le mari
de l’autre m’insupportent encore plus. Ils passent leur temps à
se plaindre, ne s’intéressent à rien d’autre qu’à leurs petites vies.
Ce n’est pas faute de leur avoir enseigné la poésie. J’étais
professeur de français figurez-vous, mais ces deux imbéciles
n’avaient de goût que pour les chiffres. Je voulais échapper au
réveillon chez ma belle-fille, autant dire à un calvaire, elle
cuisine avec ses pieds, même une dinde s’autocuirait mieux.
Pour ne pas prendre le train hier matin et les rejoindre dans
leur sinistre propriété de campagne, j’ai prétendu m’être foulé la
cheville. Ils ont tous prétendu être désolés; je vous rassure, cinq
minutes, pas plus.
― Et si l’un d’eux avait décidé de venir vous chercher en
voiture?
― Aucun risque, ma fille et mon fils font un concours
d’égoïsme depuis qu’ils ont seize ans. Ils en ont quarante de plus
et personne n’a encore pu désigner le gagnant. J’étais dans ma
cuisine en train de me dire qu’à leur retour de vacances il
faudrait que je porte un bandage autour de la cheville pour
donner corps à mon mensonge quand j’ai glissé et me suis
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retrouvée les quatre fers en l’air. À minuit moins le quart, les
pompiers sont arrivés. J’ai réussi à leur ouvrir la porte, six
beaux garçons dans mon appartement, rien que pour moi le soir
du réveillon, en lieu et place de la dinde de ma belle-fille, je n’en
demandais pas tant! Ils m’ont examinée et sanglée sur leur
civière pour descendre l’escalier. Il était minuit pile, alors que
nous allions partir pour l’hôpital, j’ai demandé au capitaine s’il
voulait bien attendre quelques instants de plus. Mon état ne
justifiait aucune urgence. Il a accepté, je leur ai offert des
chocolats, nous avons attendu le temps qu’il fallait...
― Qu’est-ce que vous attendiez?
― À votre avis? Que le téléphone sonne! Ce n’est pas
encore cette année que l’on départagera mes deux oisillons. En
arrivant à l’hôpital, je riais à cause de ma cheville qui gonflait
dans le camion de pompiers. Finalement je l’ai eu, mon
bandage.
J’ai aidé Alice à s’allonger sur son lit, j’ai allumé son poste
de télévision et l’ai laissée se reposer. Aussitôt rentré chez moi,
je me suis précipité sur le téléphone pour appeler ma mère.
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Chapitre 8
Janvier était glacial. Luc rentra de son séjour plus motivé
que jamais par ses études. Son père lui avait tapé sur les nerfs et
sa petite sœur avait passé plus de temps avec sa console de jeux
qu’à lui parler. À ma demande, Luc était allé rendre visite à ma
mère. Il lui avait trouvé une petite mine. Elle lui avait confié une
lettre et un cadeau de Noël à me remettre.
Mon chéri,
Je sais combien ton travail t’accapare. Ne regrette rien,
j’étais un peu fatiguée le soir de Noël et me suis couchée tôt. Le
jardin est comme moi, endormi sous le givre de l’hiver. Les
haies sont blanches et le spectacle est magnifique. Le voisin est
venu me porter plus de bois qu’il n’en faut pour tenir un siège.
Le soir, j’allume ma cheminée et regarde le feu crépiter dans
l’âtre en pensant à toi et à la vie trépidante que tu mènes. Cela
me rappelle tant de souvenirs. Tu dois mieux comprendre
pourquoi il m’arrivait de rentrer épuisée à la maison et j’espère
que tu me pardonnes maintenant ces soirées où je ne trouvais
pas toujours la force de te parler. J’aimerais te voir plus
souvent, ta présence me manque, mais je suis fière et heureuse
de ce que tu accomplis. Je viendrai te voir dès les premiers
jours du printemps. Je sais que je t’avais promis une visite en
février mais avec le gel qui perdure, je préfère être prudente;
je ne voudrais pas m’imposer à toi en patiente éclopée. Si par
chance tu réussissais à prendre quelques jours, et bien qu ’en
t’écrivant cela je sache la chose impossible, j’en serais la plus
heureuse des mères.
C’est une belle année qui nous attend, en juin tu seras
diplômé et ton internat commencera. Tu le sais mieux que moi
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mais le seul fait d’écrire ces mots me rend si fière que je
pourrais les recopier cent fois.
Alors, bonne et heureuse année, mon enfant.
Ta maman qui t’aime.
P-S: Si tu n’aimes pas la couleur de cette écharpe, tant
pis, tu ne pourras pas la changer, c’est moi qui te l’ai tricotée.
Si elle est un peu de traviole, c’est normal, c’est la première fois
que je tricote et la dernière aussi, j’ai eu horreur de ça.
J’ai défait le paquet et passé l’écharpe autour de mon cou.
Luc s’est aussitôt payé ma tête. Elle était violette et plus large à
une extrémité qu’à l’autre. Mais une fois nouée, on n’y voyait
que du feu. Cette écharpe, je l’ai portée tout l’hiver.
*
**
Sophie avait réapparu à la fin de la première semaine de
janvier. J’étais passé chaque nuit dans son service, sans jamais
l’y trouver. C’est elle qui vint me rendre visite aux Urgences, le
jour de son retour. La couleur hâlée de sa peau détonnait au
milieu de la pâleur des visages environnants. Elle avait eu, me
dit-elle, besoin de prendre l’air. Je l’entraînai dans le petit café
en face de l’hôpital et nous dînâmes tous deux avant de
reprendre notre service.
― Tu étais où?
― Comme tu peux le constater, au soleil.
― Seule?
― Avec une amie.
― Qui?
― Moi aussi j’ai des amies d’enfance. Comment va ta
mère?
Elle me laissa parler un long moment et, soudain, elle posa
sa main sur la mienne et me regarda avec insistance.
― Cela fait combien de temps, toi et moi? me demanda-t-
elle.
― Pourquoi cette question?
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― Réponds-moi. C’était quand, notre première fois?
― Le jour où nos lèvres ont glissé alors que j’étais venu te
voir dans ton service, dis-je sans aucune hésitation.
Sophie me regarda, l’air désolé.
― Le jour où je t’ai offert une glace au parc? continuai-je.
Sa mine s’assombrit encore plus.
― Je te demande une date.
J’avais besoin de quelques secondes de réflexion, elle ne
m’en laissa pas le temps.
― La première fois que nous avons fait l’amour, c’était il y
a deux ans, jour pour jour. Tu ne t’en souviens même pas. Nous
ne nous sommes pas vus depuis deux semaines et nous fêtons
cet anniversaire dans un bar miteux en face de l’hôpital, juste
parce qu’il faut bien avaler quelque chose avant de prendre
notre garde. Je ne peux plus être tantôt ta meilleure amie,
tantôt ta maîtresse. Tu es prêt à te dévouer à la terre entière, à
un étranger rencontré le matin même, et moi, je ne suis que la
bouée à laquelle tu t’accroches les jours d’orage mais que tu
délaisses aussitôt qu’il fait beau. Tu as eu plus d’attention pour
Luc en quelques mois que pour moi depuis deux ans. Que tu
refuses de le voir ou pas, nous ne sommes plus dans une cour
d’école à faire les quatre cents coups. Je suis une ombre dans ta
vie, tu es bien plus que ça dans la mienne et ça me fait du mal.
Pourquoi m’as-tu emmenée chez ta mère, pourquoi ce moment
si intime dans ton grenier, pourquoi m’avoir laissée entrer dans
ta vie si ce n’était qu’en simple visiteuse? J’ai pensé cent fois te
quitter mais je n’y arrive pas toute seule. Alors je te demande un
service, fais-le pour nous, ou si tu crois que nous avons quelque
chose à partager, même si ce n’est que pour un temps, donne-
nous vraiment les moyens de vivre cette histoire.
Sophie s’est levée et a quitté la salle. À travers la vitrine, je
l’ai vue sur le trottoir attendant que le feu passe au rouge pour
traverser la rue, il pleuvait, elle a remonté le col de sa blouse sur
sa nuque et, sans que je sache pourquoi, ce geste si anodin m’a
donné terriblement envie d’elle. J’ai vidé mes poches sur la table
pour payer l’addition et je me suis précipité à sa poursuite. Nous
nous sommes embrassés sous une averse glaciale, et entre nos
baisers, je me suis excusé du mal que je lui avais fait. Si j’avais
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su, je lui aurais aussi demandé pardon du mal que j’allais
bientôt lui faire, mais je l’ignorais encore et mon désir était
sincère.
Une brosse à dents dans un verre, deux ou trois affaires
dans un placard, un réveil sur une table de nuit, quelques livres
emportés, j’ai laissé mon studio à Luc et me suis installé chez
Sophie. Je repassais tous les jours chez moi, une petite visite de
rien du tout, comme un marin qui vient à quai vérifier les
amarres. J’en profitais chaque fois pour monter un étage de
plus. Alice se portait comme un charme. Nous faisions un brin
de conversation, elle débitait des horreurs sur ses enfants et cela
la réjouissait. J’avais laissé des consignes à Luc pour que, en
mon absence, il s’assure à son tour qu’elle ne manquait de rien.
Un soir, alors que nous nous retrouvions tous les deux par
hasard chez elle, elle nous fit une remarque pour le moins
surprenante.
― Au lieu de mettre des enfants au monde et de s’évertuer
à les élever, on ferait mieux de les adopter à l’âge adulte, au
moins on saurait à qui on a affaire. Vous deux, je vous aurais
tout de suite choisis.
Luc me regarda, stupéfait, et Alice, folle de joie devant son
effet, enchaîna.
― Ne soyons pas hypocrites, tu m’as bien dit que tes
parents te tapaient sur les nerfs, alors pourquoi les parents
n’auraient-ils pas le droit de ressentir la même chose à l’égard
de leur progéniture?
Et, comme Luc demeurait sans voix, je l’entraînai dans la
cuisine et lui expliquai en aparté qu’Alice avait une forme
d’humour particulière. Il ne fallait pas lui en vouloir, elle se
consumait de chagrin. Elle avait beau tout essayer pour rester
digne devant tant de peine, et même tenter de les haïr, rien n’y
faisait, l’amour qu’elle portait à ses enfants était le plus fort. Elle
souffrait le martyre d’avoir été abandonnée.
Ce n’est pas Alice qui m’avait confié ce secret, mais un
matin, alors que je lui rendais visite, le soleil était entré dans
son salon et nos ombres s’étaient côtoyées d’un peu trop près.
- 127 -
*
**
Aux premiers jours de mars, le personnel des Urgences fut
convoqué en assemblée générale. On avait découvert que les
dalles des faux plafonds contenaient de l’amiante. Des équipes
spécialisées devaient venir les remplacer, les travaux dureraient
trois jours et trois nuits. Pendant ce temps, un autre centre
hospitalier prendrait la relève. Le personnel était au chômage
technique tout le week-end.
J’appelai aussitôt ma mère pour lui faire part de la bonne
nouvelle, j’allais pouvoir lui rendre visite, j’arriverais le
vendredi. Ma mère resta silencieuse un instant et m’annonça
qu’elle était désolée, elle avait promis à une amie de
l’accompagner dans le Sud. L’hiver avait été particulièrement
rigoureux et quelques jours de soleil ne pouvaient pas leur faire
de mal. Le voyage était organisé depuis des semaines, les arrhes
déjà versées à l’hôtel et les billets d’avion non remboursables.
Elle ne voyait pas comment annuler. Elle avait tellement envie
de me voir, c’était vraiment idiot, elle espérait que je
comprendrais et ne lui en voudrais pas. Sa voix était si pâle que
je la rassurai aussitôt, non seulement je comprenais mais je me
réjouissais qu’elle sorte de chez elle pour faire un petit voyage.
Le printemps arriverait avec la fin du mois et, lorsqu’elle
viendrait, nous rattraperions le temps perdu.
Ce soir-là, Sophie était de garde, moi pas. Luc était en
pleines révisions et il avait besoin d’un coup de main. Après
avoir dévoré une assiette de pâtes, nous nous installâmes à mon
bureau, je jouai au professeur, il endossa le rôle de l’élève. À
minuit, il envoya son manuel de biologie valdinguer à l’autre
bout de la pièce. J’avais connu, à l’approche des examens de
première année, une tension similaire, l’envie de tout plaquer,
de fuir le risque d’échouer. J’allai récupérer le livre et repris
comme si rien ne s’était passé. Mais Luc était ailleurs et son
désarroi m’inquiétait un peu.
― Si je ne quitte pas cet endroit pendant au moins deux
jours, je vais imploser, dit-il. Je donnerai ce qui restera de mon
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corps à la médecine. Le premier incubateur humain à avoir pété
de l’intérieur, ça devrait les intéresser. Je me vois déjà allongé
sur la table de dissection, entouré de jeunes étudiantes. Au
moins, des filles m’auront tripoté les roubignoles juste avant
que je finisse six pieds sous terre.
De cette tirade, je conclus que mon ami avait vraiment
besoin de prendre l’air. Je réfléchis à la situation et lui proposai
d’aller poursuivre ses révisions à la campagne.
― J’aime pas les vaches, me répondit-il, lugubre.
Un silence s’installa, je ne quittais pas Luc des yeux tandis
qu’il continuait de regarder dans le vague.
― La mer, dit-il. Je veux voir la mer, l’horizon jusqu’à
l’infini, le grand large, les embruns, entendre les mouettes...
― Je crois que j’ai compris le tableau, lui dis-je.
Les premières côtes se trouvaient à trois cents kilomètres,
le seul train qui s’y rendait était un omnibus, le voyage
prendrait six heures.
― Louons une voiture, tant pis, mon salaire de brancardier
y passera, c’est moi qui régale, mais je t’en supplie, emmène-
moi à la mer.
Au moment où Luc achevait sa supplique, Sophie poussa la
porte et entra dans le studio.
― C’était ouvert, dit-elle, je ne vous dérange pas?
― Je croyais que tu étais de garde?
― Moi aussi je le croyais, je me suis tapé quatre heures
pour rien. Je me suis trompée de jour, et il m’a fallu tout ce
temps-là pour me rendre compte qu’on était deux dans le
service. Quand je pense que j’aurais pu passer une vraie soirée
avec toi.
― En effet, fis-je.
Sophie me regarda longuement, sa moue présageait du
pire. J’ouvrais grand les yeux, une façon silencieuse de lui
demander ce qui n’allait pas.
― Tu pars à la mer ce week-end, si j’ai bien compris? Oh,
ne fais pas cette tête, je n’écoute pas aux portes, Luc beuglait
tellement qu’on l’entendait depuis l’escalier.
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― Je ne sais pas, répliquai-je. Puisque tu as profité de
notre conversation, tu auras remarqué que je n’ai encore rien
répondu.
Luc suivait l’échange du regard, tel un spectateur dans les
gradins d’un court de tennis.
― Tu fais ce que tu veux, si vous avez envie de passer le
week-end ensemble, je trouverai bien à m’occuper, ne vous
inquiétez pas pour moi.
Luc avait dû deviner le dilemme auquel j’étais confronté. Il
se leva d’un bond, se jeta aux pieds de Sophie et, s’accrochant à
ses chevilles, se mit à la supplier. Je me souvenais de l’avoir vu
faire un numéro similaire pour échapper un jour à une colle de
Mme Schaeffer.
― Je t’en supplie, Sophie, viens avec nous, ne fais pas ta
bêcheuse, ne le culpabilise pas, je sais que tu aurais voulu passer
ces deux jours avec lui, mais il était sur le point de me sauver la
vie. À quoi sert de faire médecine si tu refuses de porter
assistance à une personne en danger, surtout quand la personne
en question, c’est moi? Je vais mourir asphyxié sous les livres si
vous ne me sortez pas d’ici. Viens avec nous, aie pitié, j’irai
m’installer sur la plage et vous ne me verrez pas, je serai
invisible. Je te promets de me tenir à distance, je ne dirai pas un
mot, tu finiras par en oublier que je suis là. Deux jours à la mer,
rien que vous deux et l’ombre de moi, dis oui, je t’en prie, je paie
la location de la voiture, l’essence et l’hôtel. Tu te souviens des
croissants que je n’avais faits que pour toi? Je ne te connaissais
pas, et je savais déjà qu’on allait bien s’entendre. Si tu dis oui, je
te ferai des chouquettes comme jamais tu n’en as mangé.
Sophie baissa les yeux, et demanda d’une voix très
sérieuse.
― C’est quoi, d’abord, des chouquettes?
― Raison de plus pour venir, reprit Luc, tu ne peux pas
passer à côté de mes chouquettes! Et si tu refuses, ce crétin ne
viendra pas non plus, et si je ne vais pas prendre l’air, je ne
pourrai pas reprendre mes révisions, je raterai mes examens,
bref ma carrière de médecin est entre tes mains.
― Arrête de faire l’imbécile, dit tendrement Sophie en
l’aidant à se relever.
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Elle hocha la tête et conclut qu’il n’y en avait pas un pour
racheter l’autre.
― Deux gamins! dit-elle. Va pour la mer, et je veux mes
chouquettes dès notre retour.
Nous avons laissé Luc à ses révisions, il passerait nous
chercher le vendredi matin.
Alors que nous marchions vers chez elle, Sophie me prit
Äàòà ïóáëèêîâàíèÿ: 2014-11-19; Ïðî÷èòàíî: 167 | Íàðóøåíèå àâòîðñêîãî ïðàâà ñòðàíèöû | Ìû ïîìîæåì â íàïèñàíèè âàøåé ðàáîòû!