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Jack London. Love Of Live. Stories 18 ñòðàíèöà



raccroché son talkie-walkie depuis longtemps mais elle pleurait

encore plus que les autres et m’appelait «son petit». Sophie est

venue, Luc l’avait prévenue et elle avait pris le premier train du

matin. De les voir tous les deux se tenir par la main m’apporta

un immense réconfort, sans que je puisse dire pourquoi.

Lorsque le cortège s’est dispersé, je suis resté seul devant la

tombe.

J’ai pris dans mon portefeuille une photo qui ne m’avait

jamais quitté, une photo de mon père me tenant dans ses bras.

- 172 -

Je l’ai posée sur la tombe de ma mère, pour que ce jour-là nous

soyons, une ultime fois, réunis tous les trois.

Après la cérémonie, Luc m’a déposé à la maison dans son

vieux break. Il avait fini par acheter cette voiture au type qui la

lui louait.

― Tu veux que je t’accompagne à l’intérieur?

― Non, je te remercie, reste avec Sophie.

― On ne va pas te laisser tout seul quand même, pas un

soir comme ça.

― Je crois que c’est ce dont j’ai envie. Tu sais, je n’ai pas

remis les pieds ici depuis des mois, et puis, je sens encore sa

présence dans ces murs. Je t’assure, même si elle dort au

cimetière, je vais passer cette dernière nuit avec elle.

Luc hésitait à partir, il a souri et m’a dit:

― Tu sais, à l’école, nous étions tous amoureux de ta mère.

― Je ne le savais pas.

― Elle était de loin la plus belle de toutes les mères de la

classe, je crois que même ce con de Marquès avait le béguin

pour elle.

Cette andouille avait réussi à m’arracher un sourire. Je suis

descendu de la voiture, j’ai attendu qu’il s’en aille et je suis entré

dans la maison.

*

**

J’ai découvert que maman n’avait jamais repeint la

maison. Son dossier médical se trouvait sur la table basse du

salon, je l’ai consulté. En regardant les dates qui figuraient sur

ses échographies, j’ai alors tout compris. Cette semaine de

vacances dans le Sud, qu’elle s’était soi-disant offerte avec une

amie, n’avait jamais eu lieu; à la fin de l’hiver elle avait fait un

malaise cardiaque et pendant que Luc, Sophie et moi partions

au bord de la mer, elle était hospitalisée pour subir des

examens. Elle avait inventé ce voyage parce qu’elle ne voulait

pas que je m’inquiète. J’ai fait ma médecine, espérant soigner

ma mère de tous ses maux, et je n’ai pas su déceler qu’elle était

malade.

- 173 -

Je me suis rendu dans la cuisine, j’ai ouvert le

réfrigérateur, j’y ai trouvé le dîner qu’elle s’était préparé juste

avant...

Je suis resté comme un idiot devant ce réfrigérateur ouvert

et je n’ai pu retenir mes larmes. Je n’avais pas pleuré pendant

l’enterrement, comme si elle m’interdisait de le faire, parce

qu’elle voulait que je tienne bon devant les autres. Mais ce sont

des petits détails qui font soudain prendre vraiment conscience

de la disparition de ceux qu’on a aimés. Un réveil sur une table

de nuit qui continue à faire tic tac, une taie d’oreiller dépassant

d’un lit défait, une photo posée sur une commode, une brosse à

dents dans un verre, une théière sur le rebord d’une fenêtre de

cuisine, le bec tourné vers la fenêtre pour regarder le jardin, et,

sur la table, les restes d’un quatre-quarts aux pommes nappé de

sirop d’érable.

Mon enfance était là, évanouie dans cette maison pleine de

souvenirs, les souvenirs de ma mère et des années que nous

avions vécues ensemble.

*

**

Je me suis rappelé que maman m’avait parlé d’une boîte

qu’elle avait retrouvée. La lune était pleine et je suis monté au

grenier.

Elle était posée en évidence sur le plancher. Sur le

couvercle, j’ai trouvé un mot écrit de la main de ma mère.

Mon amour,

La dernière fois que tu es venu, je t’ai entendu monter au

grenier. Je me doutais bien que tu allais t’y rendre, c’est pour

cela que je t’ai donné ce dernier rendez-vous ici. Je suis

certaine que par moments, il t’arrive encore de parler à tes

ombres. Ne crois pas que je me moque, seulement, cela me

rappelle ton enfance. Quand tu partais à l’école, j’allais dans ta

chambre sous prétexte d’y remettre de l’ordre et lorsque je

faisais ton lit, je prenais ton oreiller pour sentir ton odeur. Tu

étais à cinq cents mètres de la maison et tu me manquais déjà.

- 174 -

Tu vois, une mère, c’est aussi simple que cela, ça ne cesse

jamais de penser à ses enfants; du premier instant où

s’ouvrent vos yeux, vous occupez nos pensées. Et rien ne nous

rend plus heureuses. J’ai essayé en vain d’être la meilleure des

mères, mais c’est toi qui as été un fils dépassant toutes mes

attentes. Tu seras un merveilleux médecin.

Cette boîte t’appartient, elle n’aurait jamais dû exister, je

te demande pardon.

Ta mère qui t’aime et t’aime encore.

J’ai ouvert la boîte; à l’intérieur, j’y ai trouvé toutes les

lettres que mon père m’avait envoyées, à chaque Noël et pour

tous mes anniversaires.

Je me suis assis en tailleur devant la lucarne et j’ai regardé

la lune se lever dans la nuit. Je serrais les lettres de mon père

contre moi, et j’ai murmuré: «Maman, comment as-tu pu me

faire ça!»

Alors mon ombre s’est étirée sur le plancher et j’ai cru voir

à ses côtés celle de ma mère, elle me souriait et pleurait à la fois.

La lune a continué sa ronde et l’ombre de maman s’en est allée.

- 175 -

Chapitre 15

Je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Ma chambre était

silencieuse, plus aucun son ne provenait de l’autre côté de la

cloison. Les bruits auxquels j’étais habitué avaient disparu, les

plis des rideaux restaient tristement immobiles. J’ai regardé ma

montre. À 3 heures du matin Luc prenait sa pause, j’avais envie

de le voir. Cette idée m’a guidé et j’ai refermé la porte de la

maison sans soupçonner jusqu’où mes pas me conduiraient.

Je tournai au coin de la ruelle. Caché dans l’ombre de la

nuit, je vis mon meilleur ami assis sur sa chaise en pleine

conversation avec son père. Je n’ai pas voulu les interrompre,

j’ai fait marche arrière et j’ai continué mon chemin. Ne sachant

où aller, j’ai marché jusqu’aux grilles de l’école, le portail était

entrouvert, je l’ai poussé et suis entré. La cour était silencieuse

et déserte, du moins c’est ce que je croyais. En m’approchant du

marronnier, j’ai entendu une voix m’appeler.

― J’étais sûr de te trouver ici.

J’ai sursauté et me suis retourné. Yves était assis sur le

banc et me regardait.

― Viens donc à côté de moi. Depuis tout ce temps, nous

avons sûrement des choses à nous dire.

Je me suis installé près de lui et lui ai demandé ce qu’il

faisait là.

― J’étais présent aux obsèques de ta mère. Je suis désolé

pour toi, c’était une femme que j’appréciais beaucoup. Je suis

arrivé un peu en retard, alors je me suis placé à l’arrière du

cortège.

Ça me touchait sincèrement qu’Yves soit venu à

l’enterrement de maman.

― Qu’est-ce que tu es venu chercher dans cette cour

d’école? m’a-t-il demandé.

- 176 -

― Je n’en ai aucune idée, j’ai vécu une journée difficile.

― Je savais que tu viendrais. Il n’y a pas que l’enterrement

de ta mère qui m’ait ramené ici, j’avais envie de te revoir. Tu as

gardé ce même regard; ça aussi, j’en étais certain, même si je

voulais quand même le vérifier.

― Pourquoi?

― Parce que je pense que nous sommes tous les deux à la

recherche de quelques souvenirs, avant qu’ils ne disparaissent,

eux aussi.

― Qu’est-ce que vous êtes devenu?

― Comme toi, j’ai changé d’horizon, je me suis construit

une nouvelle vie. Mais c’était toi l’écolier, alors qu’as-tu fait

après avoir quitté ces murs et cette petite ville?

― Je suis médecin, enfin... presque. Je n’ai même pas su

détecter que ma propre mère était malade. Je croyais voir des

choses invisibles aux yeux des autres, j’étais encore plus aveugle

qu’eux.

― Tu te souviens, je t’ai promis un jour que si tu avais

quelque chose sur le cœur, quelque chose dont tu ne te sentais

pas le courage de parler, tu pouvais te confier à moi, et que je ne

te trahirais pas. C’est peut-être la nuit ou jamais...

― J’ai perdu ma mère hier, elle ne m’avait rien dit de sa

maladie, et j’ai trouvé ce soir dans le grenier de notre maison

des lettres de mon père qu’elle m’avait cachées. On commence

par un mensonge et on ne sait plus où s’arrêter.

― Que t’écrivait ton père, si ce n’est pas indiscret?

― Qu’il était venu me voir chaque année à la remise des

prix. Qu’il se tenait au loin derrière ces grilles. J’étais si près de

lui et si loin à la fois.

― Il ne te disait rien d’autre?

― Si, il m’a avoué avoir fini par renoncer. Cette femme

pour laquelle il a quitté ma mère, il a eu un autre fils avec elle.

J’ai un demi-frère. Il paraît qu’il me ressemble. J’ai une vraie

ombre cette fois, c’est amusant, non?

― Qu’est-ce que tu comptes faire?

― Je ne sais pas. Dans sa dernière lettre, mon père me

parle de sa lâcheté, il me dit qu’à vouloir offrir un futur à cette

- 177 -

nouvelle famille, il n’a jamais eu le courage de leur imposer son

passé. Je sais maintenant où tout cet amour est parti.

― Quand tu étais petit, ce qui faisait de toi un enfant

différent, c’était ton pouvoir à ressentir le malheur, pas

seulement celui qui t’affectait, mais aussi celui qui touchait les

autres. Tu es juste devenu adulte.

Yves me sourit et poursuivit en me posant une étrange

question.

― Si l’enfant que tu étais rencontrait l’homme que tu es

devenu, crois-tu qu’ils s’entendraient bien ensemble, qu’ils

pourraient être complices?

― Qui êtes-vous vraiment? lui demandai-je.

― Un homme qui refusait de grandir, un gardien d’école à

qui tu as rendu sa liberté, ou une ombre que tu as inventée

quand tu avais besoin d’un ami, à toi de choisir. Mais j’ai une

dette envers toi, et je crois que cette nuit sera le bon moment

pour l’acquitter. À propos de bon moment, tu te rappelles ce que

je t’avais dit un jour au sujet des rencontres amoureuses? Je

crois qu’à l’époque tu vivais ta première désillusion.

― Oui, je m’en souviens, je n’étais pas très heureux non

plus, ce jour-là.

― Tu sais, le bon moment, ça marche aussi pour des

retrouvailles. Tu devrais aller traîner derrière ma remise. Je

crois que tu y avais laissé quelque chose, quelque chose qui

t’appartenait. Va! Je t’attends ici.

Je me suis levé et suis allé derrière la cabane en bois, mais

j’avais beau regarder autour de moi, je ne trouvais rien de

particulier.

J’entendis la voix d’Yves me crier de mieux chercher. Je me

suis agenouillé, la lune éclairait suffisamment pour qu’on y voie

presque comme en plein jour, mais toujours rien. Le vent se mit

à souffler, une bourrasque souleva de la poussière et j’en reçus

plein la figure. Les paupières closes, je cherchai un mouchoir

pour m’essuyer les yeux et recouvrer un semblant de vision.

Dans la poche de mon blazer, celui que j’avais porté un soir en

allant au concert, je trouvai un bout de papier, un autographe

signé de la main d’une violoncelliste.

- 178 -

Je suis retourné vers le banc, Yves ne s’y trouvait plus, la

cour était à nouveau déserte. À la place où il était assis, une

enveloppe était calée sous un petit caillou. Je l’ai décachetée, il y

avait à l’intérieur une photocopie faite sur un très beau papier

que le temps avait un peu jauni.

Seul sur ce banc, j’en ai relu les lignes. C’est peut-être cette

phrase où maman m’écrivait que son plus grand souhait était

que je sois épanoui plus tard; qu’elle espérait que je trouve un

métier qui me rende heureux et que quels que soient les choix

que je ferais dans ma vie, tant que j’aimerais et serais aimé,

j’aurais réalisé tous les espoirs qu’elle fondait en moi. Ce sont

peut-être ces lignes-là qui à mon tour m’ont libéré des chaînes

qui me retenaient à mon enfance.

- 179 -

Chapitre 16

Le lendemain, j’ai refermé les volets de la maison et je suis

passé dire au revoir à Luc. Dans la vieille voiture de ma mère,

j’ai roulé toute la journée. En fin d’après-midi, je suis arrivé

dans une petite station balnéaire. Je me suis garé devant la

digue. J’ai enjambé la chaîne du vieux phare, je suis

monté jusqu’à la coupole et j’ai récupéré mon cerf-volant.

En me voyant arriver, la directrice de la pension de famille

avait l’air encore plus désolé que la dernière fois.

― Je n’ai toujours pas de chambre, me dit-elle en

soupirant.

― Cela n’a aucune importance, je suis juste venu rendre

visite à un de vos pensionnaires et je sais où le trouver.

Mme Pouchard était assise dans son fauteuil, elle se leva et

vint à ma rencontre.

― Je ne pensais pas que vous tiendriez votre promesse,

c’est une bonne surprise.

Je lui avouai que ce n’était pas vraiment elle que j’étais

venu voir. Elle baissa les yeux, vit le sac que je tenais dans une

main et jeta un œil au cerf-volant que je tenais dans l’autre. Elle

me sourit.

― Vous avez de la chance, je ne dirais pas qu’il a toute sa

tête aujourd’hui, mais il est plutôt dans un bon jour. Il est dans

sa chambre, je vous y emmène.

Nous avons monté l’escalier ensemble, elle a frappé à la

porte et nous sommes entrés dans la chambre de l’ancien

marchand du bazar.

― Vous avez de la visite, Léon, a dit Mme Pouchard.

― Ah oui? Je n’attends personne, répondit-il en posant

son livre sur la table de chevet.

- 180 -

Je m’approchai de lui et lui montrai mon aigle, en piteux

état.

Il l’observa un long moment et son visage s’éclaira.

― C’est drôle, j’en avais donné un semblable à un petit

garçon dont la mère était si radine qu’elle refusait de lui faire un

cadeau d’anniversaire. Tous les soirs le gamin me le ramenait et

le reprenait le matin, pour ne pas la gêner disait-il.

― Je vous ai menti, ma mère était la plus généreuse des

femmes, elle m’aurait offert tous les cerfs-volants du monde si

je les lui avais demandés.

― En fait, je crois que c’était un bobard qu’il avait inventé,

poursuivit le vieil homme qui ne m’avait pas écouté. Mais ce

petit gosse avait l’air si malheureux sans son cerf-volant que je

n’ai pas pu résister à l’envie de le lui offrir. Ah j’en ai vu des

gamins rêver devant l’étal de mon bazar.

― Vous pourriez le réparer? lui demandai-je, fébrile.

― Il faudrait le réparer, me dit-il, comme si seule la moitié

de mes phrases l’atteignait. Dans cet état, il n’est pas près de

voler.

― C’est exactement ce que ce jeune homme vous demande,

Léon, faites un peu attention tout de même, c’est agaçant.

― Madame Pouchard, si au lieu de me faire la leçon, vous

alliez m’acheter de quoi rafistoler ce cerf-volant, je pourrais me

mettre à l’ouvrage puisque c’est la raison pour laquelle ce jeune

homme est venu me rendre visite.

Léon nota sur une feuille tout ce dont il avait besoin. Je

récupérai la liste et fonçai à la quincaillerie. Mme Pouchard me

raccompagna à la porte et me glissa à l’oreille que si je passais

par hasard devant le bureau de tabac, elle serait la plus

heureuse des femmes.

Je revins une heure plus tard, mes deux missions

accomplies.

Le vieux marchand du bazar me donna rendez-vous le

lendemain, à midi sur la plage, il ne promettait rien, mais il

ferait de son mieux.

J’ai invité Mme Pouchard à dîner. Nous avons parlé de Cléa

et je lui ai tout raconté. Alors que je la raccompagnais à la

pension, elle m’a soufflé une idée à l’oreille.

- 181 -

J’ai trouvé une chambre dans un petit hôtel du centre-ville.

Je me suis endormi à peine la tête posée sur l’oreiller.

*

**

À midi, je me tenais devant la grève. Le marchand du bazar

arriva en compagnie de Mme Pouchard, pile à l’heure. Il déplia le

cerf-volant et me le présenta fièrement. Les ailes étaient

rafistolées, l’armature réparée et même si mon aigle avait un

peu l’air éclopé, il avait quand même retrouvé une belle allure.

― Tu peux lui faire faire un petit vol d’essai, mais sois

prudent, ce n’est plus un perdreau de l’année.

Deux petits «S» et un grand «8». Au premier coup de

vent, il s’est envolé. Le dévidoir filait à toute vitesse et Léon

applaudissait à tout-va. Mme Pouchard le prit par le bras et posa

sa tête sur son épaule. Il en rougit, elle s’excusa mais resta dans

la même position.

― Ce n’est pas parce qu’on est veuve, dit-elle, qu’on n’a pas

envie d’un peu de tendresse.

Je les ai remerciés tous les deux et les ai laissés sur la

plage. J’avais de la route à faire et j’étais pressé de rentrer.

*

**

J’ai appelé mon chef de service, j’ai prétendu que les

obsèques de ma mère me retenaient un peu plus que prévu, je

reprendrais mon service avec deux jours de retard.

Je sais, on commence par un mensonge et on ne sait plus

comment s’arrêter, mais je m’en fiche, chacun a ses raisons et

pour une fois moi aussi j’avais les miennes.

- 182 -

Chapitre 17

Je me suis présenté au conservatoire en début d’après-

midi. Le gardien m’a tout de suite reconnu. Sa gorge était

guérie, m’a-t-il dit en me faisant entrer dans son bureau. Je lui

demandai s’il pouvait m’aider à nouveau.

Cette fois, je cherchais où et quand Cléa Norman jouerait

son prochain concert.

― Je n’en sais rien, mais si vous voulez la voir, elle est

salle 105 au rez-de-chaussée au fond du couloir. Il faudra

attendre un peu, à cette heure-ci, elle enseigne et les cours se

terminent à 16 heures.

Je n’étais pas habillé comme il le fallait. Mal coiffé, mal

rasé, je me serais inventé mille raisons pour ne pas y aller. Je

n’étais pas encore prêt. Mais je n’ai pas pu résister à l’envie de la

voir.

Sa salle de classe était vitrée, je suis resté quelques instants

à la regarder depuis le couloir, elle enseignait à de jeunes

enfants. J’ai posé ma main sur la vitre, un de ses élèves a tourné

la tête vers moi et s’est arrêté de jouer. Je me suis baissé et suis

reparti à quatre pattes comme un idiot.

J’ai attendu Cléa dans la rue. Lorsqu’elle est sortie du

conservatoire, elle a noué ses cheveux et a marché vers la

station de bus son cartable à la main. Je l’ai suivie, comme on

suit son ombre, la lumière derrière soi. Pourtant, ce jour-là, Cléa

était ma seule lumière, elle avançait à quelques pas devant moi.

Elle est montée dans l’autobus, je me suis assis sur le

premier fauteuil et j’ai tourné la tête vers la vitre. Cléa s’est

installée sur la banquette arrière. À chaque arrêt j’avais

l’impression que mon cœur allait cesser de battre. Après six

stations, Cléa est descendue.

- 183 -

Elle a remonté la rue sans jamais se retourner. Je l’ai vue

pousser la porte cochère d’un petit immeuble. Quelques instants

après, deux fenêtres se sont allumées au troisième et dernier





Äàòà ïóáëèêîâàíèÿ: 2014-11-19; Ïðî÷èòàíî: 184 | Íàðóøåíèå àâòîðñêîãî ïðàâà ñòðàíèöû | Ìû ïîìîæåì â íàïèñàíèè âàøåé ðàáîòû!



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